Il n’y a pas d’alternative au maintien des seniors dans l’emploi, selon le directeur du Crédoc, qui vient de publier
La retraite à 70 ans ? aux éditions Belin.
Les seniors seront-ils des travailleurs malgré eux ?
Les quinquas d’aujourd’hui espèrent partir tôt et vont être déçus de ne plus pouvoir le faire comme leurs aînés dans les années 1980 et 1990. En revanche, on peut penser que les choses auront changé d’ici à une quinzaine d’années et que, pour certains, le fait de rester au travail ne sera pas insupportable.
D’autant plus que l’on sera dans une situation de pénurie d’emplois et que l’on aura besoin d’eux, tout au moins de ceux qui seront performants. Si les entreprises manquent vraiment de main-d’œuvre, elles seront prêtes à garder des salariés jusqu’à 60 ans et après, avec des formules à temps partiel, en leur trouvant un compromis acceptable jusqu’au jour de la retraite. Ensuite, pourquoi ne pas envisager le cumul emploi-retraite ?
Le papy-boom peut-il suffire à redresser la situation de l’emploi des seniors ?
Il n’y a pas d’alternative au maintien des seniors au travail, même au-delà du seuil de 60 ans. Le recours plus important à l’immigration, faire entrer les jeunes plus tôt dans l’entreprise, pousser davantage de femmes à travailler ? Ce n’est pas suffisant.
Nous sommes en retard sur cette question par rapport à nos voisins. La loi Fillon a laissé croire que l’on préservait le droit à partir à 60 ans. C’est une fiction, un droit juridique, mais pas sociologique, compte tenu de l’âge de début de carrière des gens.
Dans un premier temps, je suis convaincu que les entreprises vont vouloir garder les
seniors, mais ceux qui seront productifs, dans le coup, pas les autres. C’est ma vraie préoccupation. Je suis sûr que l’on évoluera dans le sens que j’évoque, mais pas forcément dans la grande fraternité…
Que faire pour que la situation s’améliore ?
Accepter la culture de l’âge dans l’entreprise. Arrêter de dire qu’on attend du salarié la même chose à 25, 50 ou 60 ans. Il faut reconnaître les qualités des différents âges par rapport à un métier. C’est fondamental.
Ensuite, il faut travailler sur l’intergénération. Pas comme les Japonais, en séparant les jeunes et les vieux, mais en cherchant l’équilibre entre jeunes et moins jeunes dans les équipes. À partir de là, on aborde la formation tout au long de la vie.
Il faut à cet effet réviser l’un des aspects de la loi sur les 35 heures, qui laisse penser que tout le temps libéré est un temps de loisirs. La réintroduction de la notion de transmission intergénérationnelle et du tutorat, la logique qualitative du travail, le temps libre plutôt que toujours plus de rémunération : voilà, à mon avis, le plan de route.