Pour éviter que des problèmes financiers ou de répartition de patrimoine empoisonnent les rapports entre les membres des familles de chacun des nouveaux conjoints, il est indispensable de prendre le temps de réfléchir sur la nécessité d’établir ou non un contrat de mariage.
Un mariage sans contrat
Si aucun contrat de mariage n’est conclu, vous êtes automatiquement unis sous le régime imposé par la loi, c’est-à-dire celui de la ” communauté réduite aux acquêts “. Son principe est simple : tous les biens acquis pendant les années de mariage (appelés biens communs), y compris les économies réalisées et les revenus produits par un bien détenu par un seul époux, appartiennent aux deux conjoints.
En revanche, chacun d’eux est personnellement propriétaire des biens qu’il possédait avant le mariage et de ceux qu’il a reçus pendant l’union par donation ou succession. Il s’agit des biens propres. Il est possible d’en faire dresser la liste par un notaire afin de préciser qui a amené quoi au moment du mariage et d’éviter tout litige ultérieur.
– Les droits du conjoint survivant.
Au décès de l’un, l’autre est propriétaire de la moitié des biens communs. L’héritage est donc composé de l’autre moitié et des biens personnels du défunt.
Lorsque les époux ne prennent aucune disposition particulière (par testament ou donation au dernier vivant), le conjoint survivant reçoit la part d’héritage prévue par la loi, qui varie notamment en fonction de la présence ou non d’enfants. Ainsi, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants «qui ne sont pas issus des deux époux» (enfants d’un précédent mariage, par exemple), son conjoint a droit au quart des biens en pleine propriété (*)
– Notre avis
Le choix de la communauté réduite aux acquêts entraîne une certaine confusion des patrimoines des deux époux de nature à provoquer des conflits familiaux au moment de la succession, surtout en présence d’enfants nés d’une première union.
Mais, si le couple dépense tous les revenus qu’il encaisse et ne fait pas d’acquisitions importantes, les patrimoines resteront distincts : le régime de la communauté réduite aux acquêts peut alors être bien adapté.
Lorsque l’un des époux a des revenus nettement plus importants que l’autre, le choix de la communauté permet de favoriser le «plus pauvre».
(*) Loi n° 2001-1 135 du 3 décembre 2001 modifiant notamment l’article 757 du code civil.Une union sans mélange de patrimoine
On peut avoir envie de rester totalement indépendant financièrement et désirer qu’au décès le patrimoine de chacun des deux époux reparte dans les familles respectives. Il convient alors de se marier sous le régime de la séparation de biens. Chacun des époux possède son patrimoine personnel, qu’il gère à sa guise, composé des biens qu’il avait avant et de ceux qu’il acquiert pendant le mariage.
– Les droits du conjoint survivant.
La succession porte uniquement sur le patrimoine personnel du défunt. Il n’y a pas au préalable de biens communs à partager, comme dans le régime de la communauté réduite aux acquêts.
Lorsque les époux ne prennent aucune disposition particulière (par testament ou donation au dernier vivant), le conjoint survivant n’a droit qu’à sa part légale d’héritage, qui varie notamment en fonction de la présence ou non d’enfants.
Ainsi, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants «qui ne sont pas issus des deux époux» (enfants d’un précédent mariage, par exemple), son conjoint a droit au quart des biens en pleine propriété (*).
– Notre avis
Lorsque les deux conjoints se trouvent en termes de revenus et de patrimoine dans une situation équivalente, le régime de la séparation de biens offre beaucoup d’atouts : facile à gérer et à liquider, il garantit la paix des familles.
Il présente cependant un inconvénient lorsqu’il existe une grande disparité des richesses dans le couple. Le conjoint le plus «pauvre» risque de voir son niveau de vie chuter brutalement au moment du décès.
(*) Loi n° 2001-1 135 du 3 décembre 2001 modifiant notamment l’article 757 du code civil.Tout se donner l’un à l’autre
Contrairement au régime de la séparation, un couple peut décider de mettre en commun tous ses biens. L’objectif est qu’au décès de l’un le patrimoine existant devienne la propriété de l’autre. Le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale au conjoint survivant est alors la solution à envisager. Le contrat de mariage définit le contenu des biens communs et en prévoit l’attribution de la pleine propriété au veuf ou à la veuve.
– Les droits du conjoint survivant
Au décès de l’un des époux, la succession n’est pas ouverte puisque l’autre est d’emblée considéré comme propriétaire de tout sans avoir à payer de droits de succession. Au décès du conjoint survivant, l’intégralité du patrimoine est héritée par la famille de celui-ci.
Cependant, les enfants légitimes ou naturels nés d’une précédente union ont la possibilité de récupérer leur part d’héritage, au décès de leur parent et pendant les 30 années qui suivent. On appelle souvent cela «l’action en retranchement». Le conjoint survivant récupérera alors la part du patrimoine restant après avoir servi les enfants mais ne paiera pas de droits de succession dessus.
Notez que, depuis la loi du 3 décembre 2001, cette disposition est beaucoup plus étendue puisqu’elle n’est plus réservée simplement aux enfants d’un premier mariage, mais à tous ceux qui ne sont pas issus des deux époux (les enfants du défunt issus d’un autre mariage, mais aussi ses enfants naturels, adultérins, etc.).
Cette mesure étant rétroactive, elle va fragiliser bon nombre de mariages sous le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale.
– Notre avis
Cette formule est à manier avec beaucoup de prudence, même pour les couples sans enfants. En effet, chaque conjoint perd le contrôle personnel de son patrimoine et ne peut plus en disposer librement puisque chacun a son mot à dire sur le sort des biens. Pour faire une donation, par exemple, ils doivent être deux.
Avec le vieillissement et le risque de dépendance, la situation peut devenir vite ingérable. Notez que le conjoint survivant paye automatiquement la prestation compensatoire que versait le défunt à un ex-conjoint.
Enfin, il faut se garder d’adopter ce régime dans le but unique de faire économiser au conjoint survivant les droits de succession : le gain n’est pas toujours aussi important qu’on le croit.
Succession : comment faire du sur mesure
Le régime matrimonial idéal de façon universelle n’existe pas. De même, il n’y a pas de formule à évincer à tout prix.
Selon le régime choisi, le conjoint survivant sera plus ou moins bien protégé au moment de la succession.
Mais les époux disposent d’outils juridiques qu’ils peuvent combiner au régime matrimonial pour en atténuer ou en corriger certains effets, notamment pour tenir compte d’une différence d’âge, de revenus, de patrimoine.
Par testament ou donation au dernier vivant, les époux peuvent s’attribuer une part d’héritage plus grande que celle prévue par la loi, dans la limite de la quotité disponible (c’est-à-dire sans toucher à la part d’héritage réservée aux enfants).
Prévoir l’attribution de la totalité de l’usufruit est une formule protectrice pour le conjoint. Mais, en cas de remariage avec une personne plus jeune, elle est à manier avec prudence, pour éviter que des enfants d’un premier mariage soient privés d’un bien durant de nombreuses années.La loi de décembre 2001 protège désormais très bien le conjoint survivant.
Dans certaines situations, on peut désirer limiter ses droits. Par exemple, en cas de remariage sur le tard, si chaque conjoint dispose d’un patrimoine équivalent et que l’on désire que les biens retournent dans les familles respectives, on peut prévoir qu’aucun des deux n’héritera des biens en pleine propriété. Dans ce cas, seul un testament vous autorise à réduire la part du conjoint survivant.