Le coup d’arrêt porté aux préretraites a pour objectif de changer les mentalités afin d’inciter les entreprises à garder leurs seniors. Mais pour l’instant, le taux de chômage progresse et les arrêts maladie se multiplient.Des chiffres accablants
Les seniors français ont l’un des taux d’emploi parmi les plus bas du monde industrialisé. Selon la Commission européenne, en 2001, seuls 31% des Français âgés de 55 à 64 ans étaient encore en activité, contre près de 67% des Suédois, 58% des Danois et 52% des Britanniques.
En France, 25 ans de préretraites systématiques ont laissé des traces durables dans le monde du travail. Des habitudes néfastes dont les conséquences débouchent sur un terrible gâchis humain et économique.
« Demain, si l’entreprise ne se réconcilie pas avec les seniors, on risque, faute de main-d’œuvre, de produire moins. Soit on délocalisera encore davantage, soit on entrera dans une économie de contraction, voire récessive. C’est le scénario catastrophe », selon Robert Rochefort, directeur du Crédoc, le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie.
• Plus de seniors au travail
En augmentant la durée de cotisation et en portant un coup d’arrêt majeur aux préretraites, la loi Fillon entend inverser la tendance en repoussant l’âge moyen de départ de 57,5 ans aujourd’hui à 59 ans en 2008.
La plupart des quadras réalisent soudain qu’ils ne décrocheront pas du travail avant un âge proche de 65 ans.
Les quinquas, eux, se retrouvent dans une situation des plus inconfortable. Ils doivent faire le deuil des départs anticipés et constatent au quotidien qu’ils ne sont toujours pas les bienvenus dans l’entreprise.
• La fin des préretraites
Impulsée par Martine Aubry, la réduction des dispositifs publics de préretraites se poursuit. Fin 2002, le nombre de bénéficiaires des programmes publics (As-fne, Arpe, Cats, Caata, PRP) est passé pour la première fois depuis dix ans sous la barre des 200 000 et concerne 181 500 personnes. La loi Fillon a également prévu de taxer à hauteur de 24% les « préretraites maison ».
Objectif : la quasi-disparition des préretraites, réservées à partir de 2005 au traitement social des coups de Trafalgar industriels. Même si nombre d’entreprises se sont hâtées de mettre en place des plans de préretraite avant l’entrée en vigueur de la loi, le 1er janvier dernier, la porte de sortie de toute une génération est en train de se refermer.
• Développement du chômage et des arrêts maladie
Les effectifs des chômeurs de longue durée se sont accrus. «Passé 55 ans, les entrées en chômage indemnisé sont désormais beaucoup plus nombreuses qu’en préretraite», souligne un document du ministère du Travail. Bien des seniors (378 000 personnes âgées de 50 à 64 ans) ont dû se résoudre à pointer à l’ANPE, le plus souvent pour une longue durée.
Les chances de retrouver un emploi s’amenuisent avec l’âge. Selon l’Unedic, 76% des hommes de 55-59 ans au chômage en mars 2000 l’étaient encore un an plus tard. Et ça ne va pas s’arranger avec la chasse aux arrêts maladie lancée par la Sécurité sociale, qui a constaté l’an dernier une forte progression des arrêts de longue durée chez les plus de 55 ans. Sombres perspectives pour les quinquas.