Vous aussi, vous avez remarqué que les prix de certains produits de base ont sérieusement augmenté depuis des dernières années. Beaucoup plus vite que l’indice des prix publié par l’Insee. Explications par Reine-Claude Mader, secrétaire générale de la CLCV (1).
Au café du coin, à la caisse du supermarché, est-ce une impression ou la vie augmente-t-elle vraiment ?
Depuis le passage à l’euro, les associations de consommateurs dénoncent des augmentations assez importantes des prix de la restauration de proximité, des produits d’entretien, des cosmétiques, des laitages et de l’alimentation.
Les gouvernements successifs, y compris de gauche, ont toujours nié le fait, sous prétexte que nous n’avions pas les moyens statistiques de produire des indications fiables.
Aujourd’hui, sans nous donner tout à fait raison, il semblerait qu’en haut lieu on estime que nous n’avions pas complètement tort. La preuve : le ministre de l’économie, Nicolas Sarkozy, a demandé à la grande distribution de calmer le jeu.
• L’Insee annonce une augmentation du coût de la vie de 2,1 % seulement en 2003. L’Institut se tromperait-il ?
L’Insee publie les prix que lui demande de publier le gouvernement, qui est très sensible à toute hausse de l’indice général dont dépendent le réajustement des minima sociaux comme le Smic, le RMI, le minimum vieillesse…
Maintenant, les chiffres de l’Insee ne sont évidemment pas faux.Simplement, dans la liste des produits référencés pour son calcul, il y en a un certain nombre que l’on achète très rarement, mais qui ont l’avantage statistique de baisser, comme les ordinateurs, la hi-fi ou les machines à laver.
Je voudrais donc que l’on nous fournisse des indices sectoriels, qui donnent une indication sur le panier quotidien d’un ménage « normal ».
• A combien évaluez-vous cette inflation masquée ?
Récemment, l’Union fédérale des consommateurs (UFC) était arrivée, sur la base d’un panier standard, à une moyenne de 10 % d’augmentation. De notre côté, nous avions constitué un échantillon très basique, avec des produits comme du sucre, de la farine, des pâtes, et nous arrivions déjà à 4,50 % !
• Est-ce la faute de l’euro ?
Ce n’est pas le fait que l’on soit passé d’une monnaie à une autre, mais que les commerçants, pour récupérer leurs marges, ont profité d’un moment où les gens étaient déstabilisés dans leur connaissance des prix.
Depuis, les consommateurs s’en sont rendu compte. Ils nous disent : « Avant, pour tant de francs, j’avais un panier plein ; aujourd’hui, pour le même nombre d’articles, il faut que je dépense plus ! » Ce n’est pas de la statistique, c’est du vécu !
J’ai dit à Nicolas Sarkozy : « Excusez-moi de m’adresser de cette façon à un ministre, mais les gens ont l’impression d’être pris pour des imbéciles ! »
• Quel conseil donneriez-vous aux consommateurs ?
Il faut boycotter les produits qui augmentent trop. Purement et simplement ! Les professionnels détestent ça.
Ensuite, maintenant que le ministre a demandé de « gros efforts » aux distributeurs, les gens doivent faire attention à ce que, sous couvert de prix à la baisse, on ne leur vende pas des quantités moindres.
Et puis il y a les produits nouveaux, qui empêchent toute comparaison : on ajoute de la poudre de perlimpinpin, on nous chante qu’on va avoir une santé du tonnerre, et les prix s’envolent… Les consommateurs ne sont pas des gogos, mais il faut leur rappeler de se méfier.
(1) Consommation, logement et cadre de vie, association de défense des consommateurs.